Interdiction des produits issus du travail forcé
- Forced labour
- Sustainability/Due diligence
Résumé
La Commission européenne propose d'interdire la vente de produits fabriqués par le travail forcé, y compris les produits agricoles. Le Parlement européen et le Conseil de l'UE sont parvenus à un accord sur cette proposition. Le nouveau règlement établira des systèmes d'information, d'enquête et d'application afin d'empêcher l'entrée de ces produits sur le marché de l'UE. Il devrait être adopté et publié au cours du deuxième trimestre 2024. Les nouvelles règles s'appliqueront à partir de 2027.
L'UE parvient à un accord sur de nouvelles règles visant à interdire la vente sur le marché de l'UE de produits fabriqués dans le cadre du travail forcé
Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil interdisant les produits fabriqués au moyen du travail forcé sur le marché de l'Union - Analyse du texte de compromis final en vue d'un accord
Mise à jour
La Commission européenne propose d'interdire la vente de produits fabriqués par le travail forcé, y compris les produits agricoles. Le Parlement européen et le Conseil de l'UE sont parvenus à un accord sur cette proposition. Le nouveau règlement établira des systèmes d'information, d'enquête et d'application afin d'empêcher l'entrée de ces produits sur le marché de l'UE. Il devrait être adopté et publié au cours du deuxième trimestre 2024. Les nouvelles règles s'appliqueront à partir de 2027.
qu'est-ce qui change ?
Le nouveau règlement interdit l'importation et la vente (y compris en ligne) de produits fabriqués au moyen du travail forcé, y compris le travail forcé des enfants. Cette interdiction s'applique à tous les stades du processus de production, y compris la récolte, la production et la transformation des produits agricoles (article 3).
La définition européenne du travail forcé est tirée de la Convention de l'Organisation internationale du travail sur le travail forcé : "tout travail ou service exigé d'un individu sous la menace d'une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s'est pas offert de plein gré".
Le nouveau règlement établit des systèmes d'information et des structures organisationnelles pour enquêter sur les cas présumés de travail forcé, ainsi que les mesures que l'UE peut prendre pour interdire et retirer du marché les produits associés au travail forcé.
Obligations des entreprises
Les entreprises ne doivent pas mettre sur le marché des produits fabriqués en recourant au travail forcé.
Le règlement ne crée pas de nouvelles obligations spécifiques ("diligence raisonnable") pour les entreprises afin de s'assurer qu'elles ne mettent pas de tels produits sur le marché (article 2). Toutefois, si l'on soupçonne que du travail forcé a été utilisé dans la production d'un produit, les entreprises qui peuvent démontrer qu'elles se sont efforcées de mettre en œuvre des règles ou d'adopter des pratiques permettant d'identifier, de prévenir, d'atténuer et de mettre fin au recours au travail forcé seront moins exposées au risque d'une enquête. La Commission publiera des lignes directrices pour aider les entreprises à faire preuve de diligence raisonnable en matière de travail forcé dans les 18 mois suivant l'entrée en vigueur du règlement.
Identification des cas de travail forcé
Les autorités compétentes des États membres de l'UE et la Commission européenne, travaillant en étroite collaboration, seront chargées d'évaluer le risque que des produits aient été fabriqués en recourant au travail forcé (article 4).
La Commission créera une base de données (publiée sur un nouveau portail unique sur le travail forcé) qui recueillera des informations sur les risques de travail forcé dans des zones géographiques spécifiques et pour des produits spécifiques, y compris lorsque le travail forcé est imposé par les autorités de l'État (article 8). Elle mettra également en place un point d'information unique où les parties prenantes pourront soumettre des informations sur les violations présumées en matière de travail forcé, à condition qu'elles soient étayées par des preuves (article 9). La Commission analysera les demandes et écartera celles qui sont manifestement incomplètes, infondées ou de mauvaise foi. Les demandes étayées seront transmises pour enquête.
Un réseau de l'Union contre le travail forcé (Union Network Against Forced Labour Products), coordonné par la Commission, sera mis en place pour permettre aux autorités compétentes des États membres d'échanger des informations et de coordonner leur action en matière de travail forcé (article 6).
Enquêtes
La Commission européenne mènera des enquêtes sur les cas présumés de travail forcé en dehors de l'UE. Les États membres de l'UE mèneront les enquêtes sur leur propre territoire.
Établissement de priorités (article 14)
La Commission adoptera une approche fondée sur le risque pour évaluer la probabilité de violations en s'appuyant sur la base de données, les éléments de preuve soumis au point d'information et les informations recueillies auprès des États membres ou par le biais de consultations avec les parties prenantes. La Commission établira des priorités d'action en fonction des éléments suivants
- l'ampleur et la gravité du travail forcé présumé
- quantité/volume des produits concernés
- l'importance du travail forcé dans la production du produit final.
Phase préliminaire (article 17)
Avant d'ouvrir une enquête, la Commission demandera aux entreprises qui fournissent les produits suspects de fournir des informations sur les mesures qu'elles ont prises pour identifier, prévenir, atténuer, éliminer ou corriger les risques de travail forcé dans leur chaîne d'approvisionnement. La Commission peut également demander des informations à d'autres parties prenantes. Les entreprises doivent répondre dans un délai de 30 jours ouvrables. Dans un délai supplémentaire de 30 jours ouvrables, la Commission décidera s'il existe un soupçon fondé de violation du travail forcé.
Enquête (article 18)
S'il existe suffisamment de preuves pour ouvrir une enquête, la Commission informera les entreprises concernées, dans les trois jours ouvrables suivant cette décision, de la portée de l'enquête et de la possibilité de soumettre des informations complémentaires dans un délai de 30 à 60 jours (ce délai peut être prolongé sur demande). La Commission se concentrera en particulier sur les opérateurs les plus proches du lieu où le travail forcé a pu se produire. La Commission peut effectuer des inspections sur le terrain dans des pays non membres de l'UE, à condition que les entreprises concernées donnent leur accord et que le gouvernement du pays concerné ne s'y oppose pas.
Décisions (article 20)
La Commission européenne s'efforcera d'adopter une décision dans les neuf mois suivant l'ouverture d'une enquête. Si les entreprises ne fournissent pas d'informations adéquates, la Commission prendra une décision sur la base des faits disponibles. Si une violation du travail forcé est établie, les entreprises concernées :
- ne pourront pas vendre les produits spécifiques ayant fait l'objet de l'enquête sur le marché de l'UE ou les exporter en dehors de l'UE
- retirer les produits du marché de l'UE ou des plateformes de vente en ligne
- devront se débarrasser des produits (pour les denrées alimentaires, en les donnant à des organisations caritatives si possible).
Toute décision d'interdiction d'un produit sera rendue publique via le portail unique sur le travail forcé.
Réexamen des décisions (article 21)
Les entreprises peuvent demander un réexamen de la décision si elles obtiennent de nouvelles informations substantielles qui n'ont pas été présentées lors de l'enquête initiale. La Commission statuera sur cette demande dans un délai de 30 jours. Si une entreprise peut démontrer qu'elle a éliminé le travail forcé de sa chaîne d'approvisionnement, la Commission retirera sa décision, les produits seront retirés du portail unique sur le travail forcé et le commerce de ces produits pourra se poursuivre. Les entreprises pourront s'adresser à une cour ou à un tribunal pour vérifier la légalité des décisions prises.
Si la Commission ne parvient pas à établir qu'il y a eu violation du droit au travail forcé, elle clôt l'enquête.
Contrôles aux frontières de l'UE
Lorsque la Commission européenne identifie des produits ou des groupes de produits présentant un risque élevé de travail forcé, elle transmet cette information aux autorités douanières des États membres de l'UE (article 26). Les autorités douanières de tout État membre de l'UE peuvent temporairement empêcher les produits identifiés comme étant à haut risque d'entrer dans l'UE. Dans un délai de quatre jours, les autorités compétentes de cet État membre décideront si les autorités douanières doivent laisser les produits entrer sur le marché ou s'ils doivent être éliminés (articles 29 et 30).
pourquoi ?
Le travail forcé est un problème récurrent, y compris dans le secteur agricole, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'UE(Euractiv 2024). Les États membres de l'UE ayant élaboré des réponses réglementaires différentes à ce problème, une législation européenne est nécessaire. La coordination et l'harmonisation des approches à travers l'Europe permettront d'apporter une réponse plus forte à la lutte contre le travail forcé et faciliteront le libre-échange des marchandises au sein de l'UE.
Calendrier
Le nouveau règlement devrait être adopté et entrer en vigueur avant la fin de l'année 2024. Il s'appliquera trois ans plus tard, vers la mi-2027.
quelles sont les principales implications pour les pays exportateurs ?
Opportunités
L'action de l'UE en matière de travail forcé a été saluée par les parties prenantes (par exemple la CES 2022) qui demandent depuis longtemps aux institutions de l'UE d'empêcher les consommateurs européens d'acheter des produits fabriqués avec du travail forcé. Un règlement visant spécifiquement les produits est considéré comme un complément important aux autres instruments de diligence raisonnable, en particulier lorsqu'il est impossible d'agir sur le terrain, par exemple dans le cas du travail forcé imposé par l'État(ECCJ 2022).
Défis pour les entreprises et les fournisseurs de l'UE
Coûts de mise en conformité
Les entreprises de l'UE devraient mettre en place un suivi plus rigoureux des risques potentiels de travail forcé, en réponse au nouveau règlement. L'impact sur les chaînes d'approvisionnement et les entreprises individuelles dépendra de l'attention déjà portée au travail forcé dans le cadre de la diligence raisonnable existante (par exemple, par le biais de normes volontaires). La fourniture et le suivi des informations pourraient engendrer des coûts supplémentaires tout au long de la chaîne d'approvisionnement.
Incertitude juridique
L'UE adoptera une approche fondée sur le risque pour identifier les violations présumées des règles relatives au travail forcé. Une diligence raisonnable appropriée est importante pour réduire le risque de travail forcé dans la chaîne d'approvisionnement, mais elle ne suffit pas à garantir que les produits ne feront pas l'objet d'une enquête. Il existe un risque potentiel que même les entreprises qui ont mis en place un système de diligence raisonnable efficace se détournent des secteurs/régions qui sont plus largement associés à des violations du travail forcé, telles qu'elles sont identifiées dans la nouvelle base de données publique. Certains ont fait valoir que la base de données doit contenir suffisamment de détails pour éviter que des opérateurs sensibles aux questions de droits du travail et engagés dans ce domaine ne soient exclus à tort du marché de l'UE(FRUCOM 2022).
Entreprises lésées par association: La proposition prévoit la création d'une base de données permettant d'identifier des zones géographiques et des produits spécifiques associés à un risque élevé de travail forcé. Les entreprises qui respectent le droit du travail risquent d'être pénalisées par association si elles sont actives dans des zones géographiques et des chaînes de valeur associées au travail forcé. Certains affirment que la base de données doit être suffisamment spécifique et détaillée pour empêcher l'exclusion du marché de l'UE d'opérateurs sensibles aux questions de droits du travail et engagés dans ce domaine(FRUCOM 2022).
Produits composites: La proposition n'est pas claire en ce qui concerne les mesures à prendre à l'encontre des produits alimentaires composites (complexes), si l'une des matières premières est identifiée comme ayant été récoltée/produite en recourant au travail forcé(FRUCOM 2022). Par exemple, un produit alimentaire contenant un ingrédient mineur devra-t-il être retiré et éliminé, même si les autres ingrédients du produit ne sont pas associés au travail forcé ?
Absence de mesures correctives pour les victimes: Certains ont critiqué la proposition parce qu'elle ne contient aucune obligation de fournir des réparations aux personnes dont les droits ont été lésés par le travail forcé, ou au moins des garanties de mesures empêchant de nouveaux préjudices(ECCJ 2022). Les causes profondes du travail forcé sont donc considérées comme non traitées(Fair Trade Advocacy Office 2022).
Actions recommandées
La Commission élaborera des orientations sur le devoir de diligence en matière de travail forcé d'ici à la fin de 2025 afin d'aider les fournisseurs et les importateurs à mettre en place des systèmes de contrôle et de notification qui réduiront le risque d'enquêtes.
Contexte
L'Organisation internationale du travail estime que 27,6 millions de personnes sont soumises au travail forcé(OIT 2022). La proposition de directive de la Commission européenne sur le devoir de diligence des entreprises en matière de développement durable établit des processus visant à garantir que les entreprises minimisent le risque que leurs activités aient un impact négatif sur les droits de l'homme. Cela inclut l'interdiction du travail forcé (Convention n° 29 de l'OIT). Toutefois, les obligations de diligence raisonnable prévues par cette proposition de directive ne visent que les plus grands opérateurs, et ces règles n'interdisent pas purement et simplement l'importation ou la vente de produits qui ont été fabriqués par le travail forcé. D'autres textes législatifs de l'UE visent à prévenir la traite des êtres humains (directive 2011/36/UE) et à interdire l'emploi des victimes de la traite (directive 2009/52/CEE). Le nouveau règlement vise à combler les lacunes du cadre juridique existant de l'UE.
Ressources
Conseil de l'UE (2023) Proposition de règlement visant à interdire les produits fabriqués au moyen du travail forcé sur le marché de l'Union - Débat d'orientation
Conseil de l'UE (2024) Proposition de règlement visant à interdire les produits fabriqués au moyen du travail forcé sur le marché de l'Union - Mandat de négociation du Parlement européen
ECCJ (2021) Key considerations for an EU instrument to control the import of forced labour products into the EU. Coalition européenne pour la justice dans l'entreprise.
CES (2022) Unions back EU ban on forced labour goods. Confédération européenne des syndicats.
Euractiv (2024) New EU forced labour rules to crack down on exploitation in agri-food supply chains. Euractiv, 5 mars.
Commission européenne (2022) Questions et réponses : Interdiction des produits fabriqués par le travail forcé dans le marché de l'Union.
Commission européenne & Service d'action extérieure de l'UE (2021) Guidance on due diligence for EU businesses to address the risk of forced labour in their operations and supply chains.
FRUCOM (2022) Feedback on a proposed regulation effectively banning products produced, extracted, or harvested with forced labour (download feedback document).
OIT (2022) Estimations mondiales de l'esclavage moderne : Travail forcé et mariage forcé. Organisation internationale du travail.
Sources
Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil interdisant les produits fabriqués au moyen du travail forcé sur le marché de l'Union - Analyse du texte de compromis final en vue d'un accord
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L'UE parvient à un accord sur de nouvelles règles visant à interdire la vente sur le marché de l'UE de produits fabriqués dans le cadre du travail forcé
Règlement
Proposal for a Regulation of the European Parliament and of the Council on prohibiting products made with forced labour on the Union market – Analysis of the final compromise text with a view to agreement
What is changing and why?
Le nouveau règlement interdit l'importation et la vente (y compris en ligne) de produits fabriqués au moyen du travail forcé, y compris le travail forcé des enfants. Cette interdiction s'applique à tous les stades du processus de production, y compris la récolte, la production et la transformation.
Les entreprises ne doivent pas mettre sur le marché des produits fabriqués en recourant au travail forcé. Les nouvelles règles ne détaillent pas les mesures spécifiques que les entreprises doivent prendre pour prévenir le recours au travail forcé ("diligence raisonnable"), mais le fait de pouvoir démontrer les efforts déployés pour identifier, prévenir et atténuer le recours au travail forcé réduira le risque de faire l'objet d'une enquête.
Le règlement met en place des systèmes d'information qui aideront la Commission et les États membres de l'UE à recueillir et à partager les preuves du recours au travail forcé, y compris un point d'information en ligne où chacun peut fournir des preuves.
La Commission prendra l'initiative d'enquêter sur les cas présumés de recours au travail forcé dans les pays tiers. Elle adoptera une approche fondée sur le risque en se concentrant sur les cas graves et à grande échelle de travail forcé présumé, en tenant compte de la quantité de produits concernés. La Commission donnera aux entreprises soupçonnées d'introduire sur le marché de l'UE des produits fabriqués en recourant au travail forcé une première possibilité de fournir des informations. Si les preuves sont suffisantes, une enquête approfondie sera lancée et les entreprises auront à nouveau la possibilité de fournir des informations. La Commission prend une décision finale dans un délai de neuf mois. Les produits enfreignant les règles relatives au travail forcé ne pourront plus être vendus sur le marché de l'UE, et les produits déjà sur le marché devront être retirés et éliminés. Une fois qu'une entreprise aura démontré qu'elle a éliminé le travail forcé de sa chaîne d'approvisionnement, elle pourra recommencer à commercialiser ses produits.
Sur la base des informations fournies par le public et par les organisations internationales, les États membres de l'UE devront évaluer s'il existe un risque que les produits aient été fabriqués en recourant au travail forcé. S'ils identifient un risque, ils ouvriront une enquête.
Au cours d'une enquête, les autorités compétentes des États membres de l'UE demanderont des informations aux entreprises. Les entreprises devront démontrer qu'elles ont déployé des efforts suffisants ("diligence raisonnable") pour identifier, prévenir, atténuer ou faire cesser le recours au travail forcé. Par exemple, elles peuvent prouver qu'elles ont mis en œuvre des lignes directrices ou des recommandations volontaires visant à éliminer le travail forcé.
Après une enquête initiale, en cas de "préoccupation fondée", l'autorité compétente d'un État membre de l'UE peut lancer une enquête approfondie. Si cette enquête complète révèle que des produits ont été fabriqués en recourant au travail forcé, les entreprises concernées
- ne pourront pas vendre les produits
- doivent retirer tout produit déjà sur le marché
- doivent éliminer les produits.
Une fois qu'une entreprise a démontré qu'elle a éliminé le travail forcé de sa chaîne d'approvisionnement, elle peut recommencer à commercialiser des produits.
Actions
La Commission élaborera des orientations sur le devoir de diligence en matière de travail forcé d'ici à la fin de 2025 afin d'aider les fournisseurs et les importateurs à mettre en place des systèmes de contrôle et de notification qui réduiront le risque d'enquêtes.
Timeline
Le règlement devrait s'appliquer à partir de la mi-2027.
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